dimanche 29 janvier 2012

Les Dates Qui Ont Fait le Sacré-Coeur de Montmartre

Jésuites

Le 14 mai   1610, assassinat de Henri IV par Ravaillac rue de la Ferronnerie à Paris. Les Jésuites recueillent son cœur dans leur collège de La Flèche.
1876 : Dans la nuit du 14 au 15 février, première apparition de la Vierge à Estelle Faguette (†1929) à Pellevoisin, dans l'Indre. (http://www.pellevoisin.net/estelle/index.htm)


Celle-ci est guérie miraculeusement de sa péritonite tuberculeuse et de la phtisie à la suite d'une nouvelle apparition le 19 février suivant (Mgr Vignancourt, archevêque de Bourges, a reconnu officiellement le 8 septembre 1983 le caractère miraculeux de la guérison). La Vierge lui rend de nouveau visite à partir du 1° juillet, et à plusieurs reprises jusqu'au 8 décembre. Le 9 septembre, soulevant une pièce de laine qu'elle porte sur la poitrine, elle laisse apparaître un Cœur rouge, le scapulaire du Sacré-Cœur, qu'elle portera également au cours des prochaines apparitions. "J'aime cette dévotion" dit-elle à Estelle Faguette, la chargeant de la promouvoir : "Je veux voir cette livrée sur la poitrine de tous mes enfants… Qu'ils s'appliquent à réparer les outrages que mon Fils reçoit dans le sacrement de son amour". Le "scapulaire de Pellevoisin" sera approuvé par un décret de la Congrégation des Rites le 4 avril 1900 : deux morceaux de laine blanche rattachés l'un à l'autre par deux cordons, l'un portant un cœur de laine rouge avec les emblèmes caractéristiques, l'autre une image de la Vierge et l'inscription "Mater misericordiae".
Dans les derniers jours de février, Mère Saint-Dominique (†1888), religieuse Dominicaine du diocèse de Saint-Dié qui se trouve en prière pour les Quarante-Heures devant le Saint Sacrement de l'église paroissiale de Mirecourt, est gratifiée d'une vision intérieure. Elle voit la basilique du Sacré-Cœur achevée, en même temps que le Seigneur s'adresse à elle et lui fait part de son désir de voir le Saint Sacrement exposé jour et nuit. Avec l'accord de ses supérieurs religieux, elle viendra s'établir à Montmartre afin de travailler à l'organisation de l'Adoration perpétuelle dans le sanctuaire du Sacré-Cœur.
" Il m'a été dit qu'Il voulait que son Cœur fût perpétuellement adoré dans l'Eucharistie et exposé jour et nuit dans une chapelle provisoire en attendant la construction de la basilique élevée à Montmartre, au nom de la France, comme centre de réparation nationale et lieu de rendez-vous de la Miséricorde et de la Justice divines, pour apporter la paix à la France, à l'Eglise et même au monde entier. "
Mère Saint-Dominique, relation de la vision des 27-28-29 février 1876, in Paul Lesourd, La Butte sacrée – Montmartre des origines au XX° siècle, Paris, Spes, 1937.

Le 3 mars, le cardinal Guibert inaugure la chapelle provisoire ouverte à proximité de la future basilique, répondant ainsi au vœu formulé par Pie IX à M. Lagarde, vicaire général de Paris : "La construction de l'édifice sera bien longue, il faudrait que la prière puisse commencer à Montmartre avant son achèvement". La chapelle est confiée aux Oblats de Marie Immaculée - congrégation dont Mgr Guibert fait lui-même partie – et trouve en Laurent-Achille Rey O.M.I. (1828-1911) son premier chapelain. Dès lors, toutes les paroisses et institutions de la capitale s'y succèdent, bientôt suivies par celles des provinces françaises. Les annales de l'Œuvre enregistrent à la fin de l'année 206 pèlerinages, soit plus de 140.000 pèlerins venus s'y recueillir.
Le 1e avril, fondation par le Père Rey et le cardinal Guibert de la Confrérie du Sacré-Cœur de Jésus"association de prières et bonnes œuvres établie dans le sanctuaire du Sacré-Cœur, à Montmartre, pour perpétuer la pensée d'expiation, de pénitence et d'invocation qui a inspiré le Vœu national au Sacré-Cœur de Jésus" selon les premiers mots des statuts. Pie IX l'érige en Archiconfrérie le 20 février 1877 – elle compte alors 20.000 inscrits, lui donnant ainsi la capacité de s'agréger d'autres confréries en France. En 1894, Léon XIII étendra ce privilège au monde entier. En janvier 1878, le nombre d'associés est passé à 30.000.
A partir du 18 avril, le premier vendredi de chaque mois, le Saint Sacrement est exposé dans la chapelle provisoire de sept heures du matin à quatre heures du soir.

Le 24 avril, Mgr Perraud, archevêque d'Autun, fonde à Paray-le-Monial les Chapelains du Sacré-Cœur, dont le Supérieur est le curé de Paray, et qui sont chargés de desservir la basilique nouvellement créée. Ils se consacrent au ministère paroissial, mais aussi à la révélation des bontés du Cœur de Jésus au travers des missions et des retraites qui leur sont confiées.
Le 24 mai, le cardinal Guibert signe l'adoption du projet concernant les travaux préalables de fondations, nécessaires à l'élévation de la basilique du Sacré Cœur. Le traité avec l'entrepreneur M. Rifaut est signé deux jours plus tard, et le 5 juin ces travaux peuvent enfin commencer. Ils dureront à eux seuls près de deux ans, nécessitant une dépense de plus de 4 millions de francs.
Les 6 et 11 mars, Hubert Rohault de Fleury obtient de Pie IX les encouragements pontificaux et les indulgences qu'il espérait pour la Sainte-Ligue du Vœu National qu'il a créé, contre l'avis du cardinal Guibert. Celui-ci en devient dès lors le protecteur, et en juillet 1878, la ligue compte déjà 15.000 membres. Il leur est demandé "d'accepter généreusement les peines de cette vie et de faire seize communions par an", ainsi que "pour la réussite de l'Œuvre, des prières ferventes et incessantes".
1879 A partir du 1° juin, le Père Rey, chapelain de la basilique du Sacré-Cœur, organise une adoration quotidienne devant le tabernacle de la chapelle provisoire, de six heures du matin à six heures du soir.
1880 : Au mois de juin, le Père Rey multiplie les jours d'exposition du Saint Sacrement dans la chapelle provisoire de la butte Montmartre. Début novembre puis au mois de décembre, il renouvelle ces expositions répétées, jusqu'à trois fois par semaine.

1881 : En janvier, le Père Rey fait part de son souhait de voir se multiplier les adorateurs devant le Saint Sacrement exposé en la chapelle provisoire de la butte Montmartre :
" Nous avons le bonheur de constater que Notre-Seigneur est bien rarement seul, mais nous voudrions qu'il ne le fût jamais ! Nous voudrions aussi que Paris ne fût pas seul à payer cette dette de reconnaissance, de réparation et d'amour ; nous voudrions que toute personne pieuse qui vient à la capitale, vînt jusqu'à Montmartre adorer Notre-Seigneur, lui rendre hommage de la manière qu'il a désignée lui-même comme lui étant particulièrement agréable. La France viendrait, ainsi, se prosterner au pied de Jésus Amour ; et le Cœur si aimant de notre bon Sauveur ne résisterait pas à cette humble mais généreuse manifestation. "
En février, la Mère Saint-Dominique insiste auprès du Père Rey pour que soit inaugurée l'exposition jour et nuit du Saint Sacrement.
Au cours des nuits des 27 et 28 février, à l'occasion du carnaval, deux nuits d'adoration réparatrice sont organisées, qui regroupent 11 adorateurs le 27, et 19 la nuit suivante. Plusieurs autres adorations nocturnes suivront, jusqu'en juin où 27 nuits d'adoration seront organisées pour ce seul mois. Les élections approchant, et le gouvernement s'alarmant de ces réunions nocturnes en lesquelles il croit voir la préparation d'un complot contre la sécurité de l'Etat, le cardinal Guibert demande au Père Rey de suspendre provisoirement les adorations de nuit. Elle reprendront le 29 mai 1882, et seront alors poursuivies sans interruption jusqu'au transfert dans la grande Basilique le 1e août 1885.
Le 21 avril, le cardinal Guibert célèbre la première Messe dans la chapelle Saint-Martin de la crypte de la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre. Le même jour, répondant à la demande de Mgr Rivet, évêque de Dijon, il agrège l'Association de Prière et de Pénitence créée par Edith Royer à l'Archiconfrérie du Vœu national établie à Montmartre, dont elle devient le 3° degré.
En décembre, soutenu par les anticléricaux qui ont décidé de s'attaquer à l'Œuvre du Vœu national et de faire stopper les travaux de la basilique, M. Delattre dépose à la Chambre des députés un projet de loi demandant le retrait de la loi du 24 juillet 1873. Le projet sera discuté au mois de juin 1882.
Du 28 au 30 juin, réunion à Lille du premier Congrès Eucharistique International, créé à l'initiative d'Emilie Tamisier (1844-1910), soutenue par Mgr de Ségur (1820-1881) et Léon XIII. Ils sont destinés à approfondir la doctrine de l'Eucharistie, et à rendre un hommage public et solennel au Saint-Sacrement. En 1888, le Congrès choisira la nef de la basilique Montmartre en construction pour lieu de son rassemblement, et en 1897, Paray-le-Monial. Le premier Congrès Eucharistique Français se réunira à Faverney en 1908.

1882 : Le Père Théodore Wibaux (†1882), Jésuite et ancien zouave pontifical, soumet au Messager du Cœur de Jésus l'idée d'une propagande invitant les familles à se consacrer au Sacré-Cœur. Relayée aussitôt par le journal, celle-ci remporte rapidement un grand succès auprès des lecteurs. Ainsi, de 1882 à 1886, dix mille familles se consacrent au Sacré-Cœur dans la seule ville de Marseille. En 1889, l'Apostolat de la Prière adressera à son tour un appel aux fidèles du monde entier, les engageant instamment à donner au Sacré-Cœur ce témoignage d'amour :
" Etablir le Règne du Sacré-Cœur dans les familles, c'est préparer, c'est inaugurer son triomphe dans la société civile ; et le jour, où toutes les familles officiellement consacrées au Sacré-Cœur adorable de Jésus, son Règne public dans l'Etat sera proche ou déjà même commencé. "
En 1890, 35 volumes remplis des noms des familles consacrées seront ainsi déposés à Paray-le-Monial, et 7 autre volumes portés en même temps à la Basilique de Montmartre, soit le chiffre de plus d'un million de familles de tous les pays du monde rassemblés dans ces "Livres d'or du Sacré-Cœur". En 1907, le Père Mateo reprendra et complétera cette idée, avec la cérémonie de l'Intronisation.
Le 30 juin, un Acte de Consécration est lu à Paray-le-Monial par M. Gabriel de Belcastel au nom d'un grand nombre de familles françaises.
Le même jour a lieu à la Chambre des députés la discussion du projet de loi déposé par M. Delattre visant le retrait de la loi du 24 juillet 1873. Clemenceau déclare à cette occasion que cette loi est "une loi de provocation et de défi dirigée non seulement contre la ville de Paris, contre la capitale de la France républicaine, mais contre la France toute entière". Il ajoute : "On a voulu imposer à la France le culte du Sacré-Cœur comme un culte de pénitence et de contrition. […] On a prétendu nous signifier d'avoir à demander pardon d'avoir combattu comme nous combattrons encore pour les droits de l'homme, d'avoir à nous repentir d'avoir fait la Révolution française". Par 261 voix contre 199, la Chambre vote la prise en considération de la demande de M. Delattre.
Le 18 juillet, le cardinal Guibert envoie aux membres de la commission chargée d'examiner le projet de loi une très longue lettre rendue publique, en laquelle il réfute les arguments avancés par les anticléricaux. Il insiste notamment sur la nécessité qu'il y aura de rembourser les sommes offertes par les trois millions de donateurs en cas de démolition de l'édifice. "Voilà un projet qui coûterait cher au pays. Si l'on demandait au Parlement d'imposer cette charge aux contribuables pour démolir une église qui ne gêne personne, qui sera un des plus beaux monuments de la capitale, il est permis de douter que le suffrage de ceux qui paient fût disposé à ratifier une si étrange décision". Cette lettre – et sans doute ce dernier argument - produiront l'effet attendu, et le projet de loi restera sans suite.
" Messieurs les députés, la majorité de la Chambre n'a pas donné beaucoup de preuves, jusqu'ici, de la protection que les institutions religieuses, comme toutes les autres, ont droit d'attendre des pouvoirs publics ; et cependant je me refuse à croire qu'elle veuille s'approprier la proposition de M. Delattre. Je me persuade qu'en prenant en considération ce projet, elle a moins voulu s'y montrer favorable que répudier toute solidarité avec l'acte accompli, en 1873, par l'Assemblée nationale. Cette Assemblée tenait à prendre sa part dans un acte public de religion, la Chambre actuelle tient à s'en désintéresser ; l'histoire, étrangère à nos agitations, jugera ces tendances opposées. Je constate seulement que le but visé par la nouvelle majorité est pleinement atteint ; la discussion et le vote du 30 juin ont nettement fait connaître ses sentiments sur la question de l'église de Montmartre. Les documents publics qui serviront à nos annales attesteront que la Chambre élue en 1871 encouragea la religieuse entreprise, et que la Chambre élue en 1881, la désapprouva ; la postérité ne pourra s'y tromper. Tous les esprits sages et exempts de passion penseront que cela doit suffire et qu'il ne faut pas, pour rendre plus éclatante une contradiction déjà trop regrettable, se porter à des mesures excessives et se créer des embarras inextricables... "
Mgr Guibert, extrait de la lettre adressée aux membres de la Commission d'examen du projet de loi de M. Delattre.
1883 : Le 1e mai, l'exposition diurne du Saint Sacrement devient quotidienne en la chapelle provisoire de la butte Montmartre. Elle s'arrête alors à quatre heures du soir. L'adoration ne deviendra véritablement "perpétuelle", sans interruption entre celle effectuée de jour et l'adoration nocturne, que lors de son transfert en la basilique le 1août 1885.
En juin, une statue du Christ au bras ouverts est inaugurée sur le futur emplacement du maître-autel de la basilique du Sacré-Cœur à Montmartre.
Réunie à l'occasion de la 23° Congrégation générale, la Compagnie de Jésus accepte officiellement la tâche qui lui a été confiée par le Seigneur, telle qu'il l'a révélée à Marguerite-Marie le 2 juillet 1688, relative à la dévotion envers son divin Cœur : "en faire voir et connaître l'utilité et la valeur, afin qu'on en profite, en le recevant avec le respect et la reconnaissance dus à un si grand bienfait" (Lettre LXXXV à la Mère de Saumaise, (4(?) juillet 1688).
1885 : Le 1° août, le Saint-Sacrement est exposé pour la première fois à la basilique du Sacré-Cœur. C'est l'établissement définitif de l'adoration perpétuelle, qui n'a jamais cessé depuis. La création du Comité de l'Adoration diurne des Dames l'année suivante, sous la présidence de Mme Legentil, permettra aux femmes de rejoindre l'adoration qui était jusqu'alors strictement masculine.
Le Père François Voirin remplace le Père Rey au poste de Supérieur des chapelains de la basilique.
1886 Le 8 juillet, mort du cardinal Guibert, archevêque de Paris. Mgr François Richard de La Vergne, son coadjuteur depuis 1875, lui succède.
Le 19 novembre, première cérémonie d’inauguration pour la partie achevée de la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, avec bénédiction solennelle des deux absides (de la crypte et de l'église haute) par le cardinal Benoît Langénieux (1824-1904), archevêque de Reims et ancien vicaire général de Mgr Guibert, entouré de seize évêques, de deux cents prêtres et d’une foule de 3.000 fidèles.

1889 : Le 6 juin, Charles de Foucauld se consacre au Sacré-Cœur en la basilique de Montmartre, toujours en construction. En 1902 il établira canoniquement à Béni-Abbès une Confrérie du Sacré-Cœur, agrégée à celle de Montmartre, et entrera dans l'Association des prêtres apôtres du Sacré-Cœur de Jésus, fondée par le Père Alfred Yenveux en 1901.
En décembre, profitant d'un voyage à Paris, Marguerite Claret de La Touche vient se recueillir en la chapelle du Sacré-Cœur de la basilique Montmartre.
1891 : Le 15 mai, publication de l'Encyclique Rerum novarum de Léon XIII.
Le 5 juin, jour de la fête du Sacré-Cœur, bénédiction et inauguration solennelle de la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre – à laquelle il ne manque que le grand dôme - par Mgr Richard, cardinal-archevêque de Paris, assisté par trois cardinaux et par quatorze archevêques ou évêques. Cinquante-trois curés de Paris et cinq cents prêtres sont présents au milieu de la foule qui assiste à la cérémonie. A cette occasion est lue en chaire par M. le vicaire général Caron une lettre adressée par Léon XIII à Mgr Richard :
" Chers Fils,
Salut et bénédiction apostolique,
Très agréable a été pour Nous la nouvelle que nous ont apportée vos lettres du 28 avril. Vous Nous y annoncez que la construction du temple, que les fidèles de la France entière, dans une pensée d'expiation nationale et pour implorer le secours divin en faveur de leur patrie, avaient fait vœu, il y a vingt ans, d'élever sur le mont des martyrs, à Notre-Seigneur Jésus-Christ nous révélant son Cœur, se trouvait, grâce aux offrandes de toute la nation française, assez avancée pour qu'il pût dès maintenant être ouvert au culte public : et que vous avez décidé que le 5 du mois de juin prochain, jour consacré à honorer le divin Cœur, la bénédiction en serait faite solennellement selon les rites prescrits par l'Eglise. Et vous souvenant que Notre prédécesseur d'heureuse mémoire, Pie IX, approuvant le vœu public et le prenant sous ses auspices, avait accordé aux premiers débuts de l'œuvre les encouragements de sa piété et de son affection, vous avez cru devoir Nous prier d'accompagner pareillement la dédicace, qui doit incessamment s'accomplir, du témoignage de Notre affection et des dons sacrés de notre puissance.
C'est une grande joie pour Nous, cher Fils, que de voir s'élever ainsi, dans votre pays, en un lieu si célèbre, ce temple votif, monument insigne attestant la foi et la piété de la nation française, dont l'attachement à la religion de ses pères s'est, de tout temps, affirmé par l'illustres exemples. C'est pour Nous une joie qu'au sein du même peuple, où rayonnèrent les vertus de la bienheureuse habitante du ciel, disciple du divin Cœur et propagatrice de sa gloire, cette très pieuse dévotion prenne de nouveaux accroissements et se recommande à la postérité par l'exécution d'une si grande œuvre. Et ce qui augmente encore cette joie, ce sont les fruits de salut que promet une telle œuvre ; c'est la ferme confiance où nous sommes de voir le Christ Notre-Seigneur prendre de pareils adorateurs de son Cœur sous sa divine protection et sa perpétuelle sauvegarde.
Mais, à la vue de ces excellentes dispositions de la nation française, en ce qui touche la religion, Nous formons surtout un souhait : c'est que, de même que la pieuse union de tous les fidèles de France s'est merveilleusement signalée en faisant sortir de terre la masse imposante de ce temple votif, l'union de toutes les volontés s'affirme aussi et se fortifie pour défendre, au sein de la patrie, l'existence et la cause de la religion catholique ; qu'imposant silence à ces rivalités de partis, dans lesquelles s'amoindrit la force des bons et s'accroît celle des méchants, tous réunissent leurs pensées et leurs efforts pour maintenir l'honneur d'une nation, à qui l'illustre vertu de ses aïeux a valu, dans l'Eglise, une telle dignité et un nom si glorieux. De toutes les ambitions, de toutes les politiques, c'est là, en effet, la plus noble, celle à laquelle nous sommes conviés par la voix même de la divine vérité, quand elle nous enseigne qu'il faut chercher avant tout le royaume de Dieu et sa justice, et qu'elle nous recommande d'attendre, de là, la récompense par laquelle Dieu rémunère, non seulement dans le ciel, mais même dès cette terre, la pratique de la piété et de la justice et le zèle de sa gloire.
Ces avis, que Nous inspire, à votre égard, la tendresse paternelle de Notre cœur seront, Nous en avons la confiance, accueillis par les fidèles de France avec les sentiments que Nous avons toujours reconnus en des fils si pleins d'amour et si chers à notre affection. […]
Enfin, Nous ne pouvons terminer sans tourner, vers le Christ, notre Seigneur et notre Dieu, qui est la vie et la force des cœurs, et qui promet de consoler ceux qui travaillent et qui gémissent sous leurs fardeaux, les vœux les plus intimes de Notre âme, afin qu'il accueille les hommages de votre religion et de votre piété avec indulgence et miséricorde et, qu'ouvrant les trésors de sa bonté, il répande, sur vous et sur toute votre patrie, les dons les plus abondants de paix, de salut et de prospérité.
Nous voulons que vous ayez l'augure de ces faveurs célestes, comme aussi le gage de Notre sincère bienveillance dans la Bénédiction apostolique qu'à vous, cher Fils, à tout le clergé et à tous les fidèles de la France, nous accordons avec toute la tendresse de Notre cœur.
Donné à Rome, près Saint-Pierre, le 5 mai de l'année 1891, de Notre pontificat de quatorzième.
Léon XIII, Pape. "
Le Messager du Cœur de Jésus, Tome LX°, Juillet 1891.
1892 : Le 14 juillet, le Comité du Vœu National fait placer sur la basilique Montmartre au côté du drapeau tricolore une croix électrique visible de tout Paris. "Il était beau et doux à contempler, le signe sacré de notre rédemption, brillant dans le ciel au milieu de la nuit, éclairant de ses reflets le drapeau national dont la basilique était pavoisée" écrira le journal Le Monde le 18 juillet suivant.
1893 : Le 22 octobre, pour célébrer l'alliance franco-russe, le cardinal Richard ordonne un Te Deum dans toutes les paroisses de Paris, et préside celui de la basilique Montmartre.
1895 : Le 20 novembre, une cloche de 19 tonnes (la plus grosse de France) fondue en 1891 à Annecy et offerte par la Savoie à la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre est baptisée par Mgr Richard sous le nom de Françoise-Marguerite-Marie du Sacré-Cœur de Jésus. Le Père Jacques Monsabré (1827-1890) déclare à cette occasion : "Puisse-t-elle bientôt sonner le pardon de Dieu, le réveil de la France et les gloires du Sacré-Cœur !". La Savoyarde – ainsi nommée - prendra possession le 13 mars 1907 de l'emplacement qui lui était réservé au bas du campanile, juste au-dessus de la coupole de la chapelle de la Sainte Vierge.

1897 : Le 17 janvier, célébration à la basilique du XXV° anniversaire du Vœu National.
Le 21 janvier, Gustave Rouanet, député du XVIII° arrondissement de Paris, demande à la Chambre la désaffectation du Sacré-Cœur. Albert de Mun (1841-1914), fondateur en 1871 des Cercles catholiques d'ouvriers et en 1886 de l'Association Catholique de la Jeunesse de France, prend la défense du sanctuaire, rappelle l'argument financier avancé par le cardinal Guibert en 1882, et insiste sur le chômage qu'encourraient alors les ouvriers employés aux travaux de la basilique. Par 332 voix contre 196, l'urgence demandée pour le projet de loi est repoussée par la Chambre, et le projet définitivement abandonné.
Le 5 août, le cardinal Perraud procède par privilège accordé par Léon XIII au couronnement pontifical de la statue de la Vierge à l'Enfant située en la chapelle Notre-Dame de Romay, à Paray-le-Monial.
Un décret du Saint-Siège autorise le renvoi au dimanche de la solennité de la fête du Sacré-Cœur.
1898 : Le 13 janvier, la lettre ouverte d'Emile Zola au Président de la République paraît dans le journal l'Aurore : "J'accuse", qui défend l'innocence d'Alfred Dreyfus. Dans l'ouvrage intitulé Paris paru la même année, il entreprend une charge violente contre le Vœu national, qui est interprété comme une expiation de la Révolution, du libre examen et de la raison. L'affiche du journal Républicain anticlérical La Lanterne (signée Eugène Ogé) représentant le cardinal Richard en vampire, accroché par ses griffes au Sacré-Cœur avec la légende "Voilà l'ennemi !", date de la même époque.
Le 4 mars, le cardinal Richard érige canoniquement la Congrégation des religieuses adoratrices du Sacré-Cœur qu'a fondée en juin 1897 Adèle Garnier (1838-1924) en s'installant avec trois compagnes rue du Mont-Cenis, près de la basilique en construction : la Société des Sœurs du Sacré-Cœur de Montmartre. Adèle Garnier prend en religion le nom de Mère Saint-Pierre. Leur nombre augmentant, elles s'installent bientôt, grâce à une aide financière des Pères Chartreux, rue du Chevalier-de-la-Barre, où elles resteront jusqu'à ce que les lois de 1901 contre les congrégations religieuses ne les chassent de Montmartre et de France. Elles se réfugient alors en Angleterre. La congrégation deviendra de droit pontifical en 1930. Elle compte aujourd'hui deux prieurés en Angleterre, un en Belgique et un en Australie, la résidence de la Supérieure générale et le Noviciat demeurant en France.
Le 16 décembre, bénédiction et pose de la clef de voûte du grand dôme de la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre.
1900 : Le 23 juin, inauguration du dôme de la basilique du Sacré-Cœur.
1903 : Le 30 mars, jour du Vendredi Saint, suite à la loi sur les congrégations, les Oblats de Marie Immaculée quitte le sanctuaire de Montmartre.
1912 : Le 6 avril, le campanile de la basilique du Sacré-Cœur étant achevé, a lieu la pose de la croix du lanternon de la flèche conique.

1945 : Le 7 mai, l'Allemagne capitule sans condition à Reims.
Du 14 au 17 juin, l'Apostolat de la Prière organise à Paris un congrès national qui a pour thème Le Sacré-Cœur de Jésus et la doctrine du Corps mystique.
Le 17 juin, les délégués de tous les diocèses consacrent à Montmartre, en présence des cardinaux, archevêques et évêques de France, un million de familles françaises au Sacré-Cœur. Un message de Pie XII qui leur est destiné est lu au cours de cette cérémonie.
" Nous sommes de cœur au milieu de vous, familles de France qui venez renouveler votre consécration au Cœur de Jésus qui aime les Francs : quelle splendeur, quelle puissance ! Quelle responsabilité aussi, car les destinées de votre patrie sont entre vos mains, mais à la double condition que, fiers de votre appartenance au Christ et conscients de la force qu'elle vous confère, vous vous montriez imperturbablement fidèles à cette appartenance et que vous usiez vaillamment de cette force.
La valeur et la prospérité d'un peuple résident, non pas dans l'action aveugle d'une multitude confuse, mais dans l'organisation normale des familles saines et nombreuses, sous l'autorité respectée du père, sous la sage et vigilante providence de la mère, dans l'union intime et coopérante des enfants.
Chaque famille s'étend, se dilate dans la parenté qu'unissent les liens du sang. Et les alliances entre familles viennent encore, par leurs harmonieux enchevêtrements, constituer de maille en maille tout un réseau dont la souplesse et la solidité assurent l'unité vitale d'une nation, grande famille au grand foyer qu'est la patrie.
Réseau tellement parfait et délicat que chaque maille qui viendrait à se rompre ou à se relâcher risquerait de compromettre, avec l'intégrité du réseau, tout l'organisme de la société. Or, cette rupture ou ce relâchement, cet affaiblissement ou cette dégénérescence de la famille se produisent avec leurs funestes conséquences toutes les fois qu'une atteinte est portée à la sainteté ou à l'indissolubilité du mariage, à la fidélité ou à la fécondité conjugale, toutes les fois que l'autorité paternelle, par abdication des parents ou par insubordination des enfants, se trouve mise en échec.
Des fragments de familles brisées ou désagrégées ne sont guère plus propres à constituer une société saine et stable que le conglomérat amorphe d'individus dont Nous parlions récemment. Grande certes, et noble et pure, est la félicité d'un foyer patriarcal, intact dans son intégrité comme dans sa dignité. Mais - qui oserait le nier ? - cette félicité est le prix de l'attachement à des devoirs austères, de la victoire sur des obstacles ou des attraits, sur les passions déréglées ou les tentations de la chair ou du cœur. Or, il y faut du courage, un courage généreux et, surtout, permanent, continu, à longueur d'année, à longueur de vie.
A moins d'ignorer étrangement la faiblesse humaine, de fermer obstinément les yeux devant l'évidence, force est de reconnaître qu'un tel courage ne peut surgir, moins encore se soutenir par le seul effet des arguments de la simple et froide raison. La doctrine pure, la morale sublime, les espérances éternelles de la foi chrétienne contribuent grandement à l'engendrer, mais ce n'est pas surtout son action extérieure qui donne à la religion du Christ cette salutaire influence, cette vertu merveilleuse de sauvegarder la pureté, la sainteté du mariage et de la famille au milieu d'une fausse civilisation corrompue et corruptrice. Le Christ agit dans les âmes par l'infusion de sa grâce plus encore que par ses enseignements, ses exhortations, ses promesses ; surtout Il est par son Eucharistie, la "source de la vie et de la sainteté". Quel temple auguste devient le foyer où le père, la mère, les enfants, vivent, nourris et abreuvés de la chair et du sang de Dieu !
Quand une famille vit ainsi du Christ, que par sa consécration au Cœur du Christ elle a ratifié son union avec Celui qui a vaincu le monde et s'est vouée à l'amour, au service, au règne de ce Cœur divin, qu'elle a fait de son règne l'idéal qui la fascine et auquel visent toutes ses aspirations ; quand plusieurs familles, animées du même esprit, tendues vers le même idéal, sont unies dans la compacte intégrité du corps mystique de l'Homme-Dieu, quand ces familles sont des milliers, des centaines de milliers, quand un million de pères, de mères, des millions et des millions d'enfants consacrent avec une ardeur passionnée toutes leurs énergies à promouvoir la cause et le règne de Jésus, qui mesurera la puissance d'une telle armée sous un tel chef ?
La timidité, l'hésitation, la défiance abattant vos courages et brisant votre élan, stériliseraient tous vos efforts. Et c'est pourquoi Nous vous indiquions la fierté de votre appartenance au Christ, la conscience de votre force, pour restaurer tout en lui sous sa conduite et dans son règne, comme condition essentielle pour la voir produire ses effets merveilleux.
Courage donc, familles chrétiennes, familles françaises du Sacré-Cœur ! Votre phalange est assez considérable, assez forte pour marcher en assurance. Et pourtant, regardez ! Ne voyez-vous pas autour de vous d'autres familles en nombre bien plus imposant que le vôtre, fixer les yeux sur vous et n'attendre pour marcher avec vous que de recevoir de vous le branle ?
Votre consécration au Cœur de Jésus scelle un pacte entre Lui et vos familles. Il en a pris l'initiative par sa promesse : "Je les bénirai," disait-Il à sainte Marguerite-Marie.
De votre côté, avec toute la solennité que vos moyens vous permettaient, sous la bénédiction du prêtre. son représentant, vous avez mis son image à la place d'honneur de votre foyer dont vous le proclamiez le souverain, vous engageant officiellement à le regarder et à le traiter comme tel. Lui, ne manquera jamais à sa parole : Il est le Dieu fidèle. Ne manquez pas à la vôtre. Faites-le régner chez vous et autour de vous.
Consacrée, votre demeure est donc, par définition, une demeure désormais sacrée : rien n'y doit offenser les yeux, les oreilles, le Cœur de Jésus. Il en est le Roi : Il doit y recevoir de votre fidélité un hommage permanent de respect, de dévotion. d'amour. Chef très aimant de votre foyer, il est associé intimement à toute sa vie et l'on n'y conçoit aucune peine, aucune joie, aucune inquiétude, aucune espérance, à laquelle vous Le laisseriez étranger. C'est le royaume du Christ : il est sacré !
Il n'y aurait qu'une vaine et stérile complaisance d'amour-propre, ou plutôt qu'une humiliante contradiction à prendre conscience de votre force si vous n'en deviez user pour le maintien, la défense, la conquête des droits du Cœur de Jésus qui sont aussi vos droits, les droits de votre famille et de votre patrie. Pères de familles chrétiennes, qui sont l'honneur et la vitalité de la France, il vous appartient et vous avez le devoir de parler et d'agir au nom de vos familles, au nom de la France, de cette France qui, au lendemain de douloureux désastres, a gravé sur le fronton de votre basilique de Montmartre l'émouvante humilité de son repentir, l'ardeur de son amour et de sa dévotion Poenitens et devota !Au nom donc de vos familles et de la France, défendez la sainteté du mariage et l'unité du foyer, ravagées par le divorce ; défendez l'autorité des parents et leur liberté d'élever chrétiennement leurs enfants sans dommage ; défendez l'enfance et l'adolescence contre les propagandes impies et déshonnêtes, contre la séduction des spectacles scandaleux, contre les licences pernicieuses d'une presse et d'une radio sans contrôle.
Au nom de vos familles et de la France, revendiquez pour vos cités la décence, la dignité des rues et des places publiques, le droit pour tous vos concitoyens de pratiquer ouvertement leur religion, pour votre clergé, vos religieuses, celui de faire du bien aux petits, aux ignorants, aux pauvres, aux malades, aux mourants.
Au nom de vos familles et de la France, préparez et procurez l'avènement du règne de Dieu et du Cœur de Jésus dans votre patrie, la reconnaissance de sa divine majesté, dans la sanctification du dimanche et des fêtes, dans l'exercice du culte public, dans la pratique de la justice, de la charité sociales, de la réconciliation mutuelle, dans le calme et dans l'ordre, en un mot, dans la paix.
Vous venez de proclamer une fois de plus que vous croyez à la vocation chrétienne de la France. Il est fidèle l'auteur de cette sublime vocation : "Fidelis Deus, per quem vocati estis". Que par vous, familles chrétiennes consacrées au Cœur de Jésus, la France, de son côté, soit fidèle à y répondre.  "
Pie XII, Message au Familles de France, 17 juin 1945.
1952 : Pie XII approuve les nouveaux statuts de l'Archiconfrérie du Sacré-Cœur de Montmartre, qui mentionnent expressément l'adoration eucharistique et la distinction entre apôtres et autres membres.
1919 Le 15 août, le cardinal Amette promulgue une lettre pastorale qui annonce la consécration prochaine de la basilique du Sacré-Cœur.

" Le jeudi 16 octobre prochain, en l'Octave de saint Denys qui a sanctifié par son martyre la colline de Montmartre, en l'anniversaire de l'apparition de l'archange saint Michel sur le mont qui porte son nom et d'où il protège notre Patrie, à la veille de la fête de la bienheureuse Marguerite-Marie, Nous Nous proposons de consacrer l'église du Vœu national élevée par la France au Sacré-Cœur de Jésus. […]
Ce sera un cantique d'action de grâces plus expressif encore que nous ferons monter vers le ciel en consacrant l'église du Vœu national. Ce temple avait été promis au Cœur de Jésus après une guerre qui laissait la France humiliée et mutilée ; il Lui sera solennellement dédié après une autre guerre qui s'achève en une paix glorieuse et nous rend les chères provinces perdues. Il faut maintenant ajouter un mot à la devise du Vœu : ce n'est plus seulement la "France pénitente et dévouée", c'est la France reconnaissante qui offre cet hommage au Christ et à son Cœur Sacré. Christo ejusque sacratissimo Cordi Gallia poenitens, devota et grata. "
Cardinal Amette, extraits de la Lettre pastorale du 15 août 1919, in R.P. Jonquet et F. Veuillot, Montmartre Autrefois et Aujourd'hui, Paris, Bloud et Gay, 1920.
Le 7 octobre, en prévision de la consécration solennelle, Benoît XV adresse une lettre au cardinal Amette dans laquelle il met l'accent sur la charité universelle que la dévotion au Sacré-Cœur doit exciter dans les âmes.
" … Cette solennité est pour Nous comme une fête de famille, et Nous voulons y envoyer tout exprès un légat qui tienne Notre place à ces saintes cérémonies. […]
Nous sommes convaincus que Dieu a présenté le sacré Cœur de Jésus à la vénération spéciale des hommes en un temps très opportun, à savoir lorsqu'il sembla que l'amour pour Dieu, qui s'était refroidi chez un grand nombre, ne pouvait être rallumé que par le feu de l'amour de Dieu pour nous. […]
Si nous voulons rendre au divin Cœur de Jésus le culte qui lui sera le plus agréable, nous devons exciter dans nos âmes cette double charité envers Dieu et envers les hommes, alors même que ceux-ci seraient ou auraient été nos ennemis. Que tous se souviennent que le pardon de nos péchés nous est offert par le Seigneur à la condition que nous pardonnions nous-mêmes à ceux qui auraient été coupables envers nous. […]
Qu'à la prière de votre compatriote, la bienheureuse Marguerite-Marie, à laquelle il a si largement découvert les richesses de son Cœur, du haut de ce temple magnifique que vous avez élevé en l'honneur de son amour, Notre Seigneur embrasse et comble de grâces non seulement la France, mais le genre humain tout entier, de telle sorte que ce que la prudence des hommes a commencé dans la Conférence de Versailles, la divine charité le perfectionne et l'achève sur le Mont des Martyrs ! "
Benoît XV, extraits de la Lettre du 7 octobre 1919 au cardinal Amette.
Le 16 octobre, consécration définitive par le cardinal Amette (1850-1920) de la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre (consécration prévue initialement le 17 octobre 1914, et reportée du fait de la guerre), sous la présidence de l’Eminentissime cardinal Vico, légat du pape Benoît XV, et en présence de plus de 90 évêques ou archevêques français et étrangers, et d'une foule innombrable de pèlerins. C'est le Père Janvier, prédicateur à Notre-Dame, qui est chargé de l'homélie :
" C'est sous l'inspiration de son Cœur que Jésus rendait la santé aux corps, la pureté aux âmes, la vie aux cadavres. C'est en suivant son Cœur qu'il multipliait les miracles en vue de toucher Israël et qu'il pleurait sur l'aveuglement de Jérusalem. Son Cœur est le foyer où bat son plein l'amour qui ne veut connaître ni la colère ni la rancune, l'amour qui n'achève aucun roseau demi-brisé, qui n'éteint aucune mèche encore fumante, l'amour qui endure tout, l'amour que rien ne lasse, sinon la malice passée à l'inflexible obstination. Son Cœur est la source où s'abreuvent les êtres altérés de grâce et de miséricorde, le sanctuaire où Clovis, Jeanne d'Arc, Belsunce, Louis XVI cherchent le secours nécessaire pour vaincre le fléau de la guerre, de la peste, de la discorde ; le brûlant symbole que chantaient nos pères quand, au milieu des dangers et des tribulations, ils s'écriaient : "Vive le Christ qui aime les Francs !" Son Cœur est l'asile où notre âge inquiet ravive sa foi en Dieu et en son propre destin… "
P. Janvier, extrait de l'Homélie du 16 octobre 1919, in R.P. Jonquet et F. Veuillot, Montmartre Autrefois et Aujourd'hui, Paris, Bloud et Gay, 1920.
Le cardinal Vico, avant d'ériger l'église en basilique mineure, intervient à son tour :
" Le Sacré Cœur de Jésus veut régner par l'amour, et il attend les hommages de tous. En conséquence, que la consécration de ce temple matériel soit un stimulant pour la consécration des individus, des familles et des nations au Sacré Cœur. Après les commotions profondes des années terribles de la guerre, quoi de plus opportun et de plus avantageux pour la régénération chrétienne de la société ? Jésus-Christ ne doit-il pas prendre possession de la royauté que Dieu son père lui a octroyée sur toutes les nations de la terre ? C'est à votre nation glorieuse que Jésus-Christ a donné les prémices de l'infinie tendresse de son Cœur ; que ce divin Cœur soit ici le bouclier de la foi, l'aliment de la piété, le remède contre l'erreur. "
Cardinal Vico, 16 octobre 1919, in R.P. Jonquet et F. Veuillot, Montmartre Autrefois et Aujourd'hui, Paris, Bloud et Gay, 1920.
Les cérémonies se poursuivent jusqu'au dimanche 19 octobre, marquées par de nouvelles célébrations en la basilique. Le dernier jour du Triduum, Mgr Rumeau, évêque d'Angers, prononce la dernière homélie de ces festivités ;
" Que la dévotion au Cœur de Jésus se répande de plus en plus dans les masses populaires pour ramener les cœurs pervers et réchauffer les cœurs refroidis ! Avec elle nous verrons la religion refleurir, les chrétiens s'affirmer, l'action catholique progresser, l'esprit religieux qui sommeille dans un trop grand nombre d'âmes se réveiller, accomplir des merveilles et assurer la paix aux consciences.
Que la dévotion au Cœur de Jésus pénètre de plus en plus dans les foyers, où son image aura été intronisée, et l'on y verra avec l'honneur et la vertu, régner la paix et l'harmonie, parce que l'Evangile y sera pris au sérieux, parce qu'on y professera toute la foi et qu'on y accomplira toute la loi.
Que la dévotion au Cœur de Jésus trouve accès dans les sphères de la vie publique ; que, pour suppléer à des abstentions regrettables, les représentants du peuple dans les conseils de la nation, des départements ou des communes, se consacrent solennellement, comme cela s'est vu dans des régions privilégiées, en leur nom et au nom des populations dont ils sont les mandataires, à ce Cœur adorable ; que cet exemple magnifique trouve de nombreux imitateurs ; qu'il s'en suive une affirmation courageuse et une pratique sincère de la foi, qu'adviendra-t-il ? Ce sera le rétablissement de l'ordre, et par là même ce sera l'affermissement de la paix à tous les degrés de l'échelle sociale, parce que l'humilité du Cœur de Jésus aura pénétré dans les âmes, avec le sens chrétien. "
Mgr Rumeau, extrait de l'Homélie du 19 octobre 1919, in R.P. Jonquet et F. Veuillot, Montmartre Autrefois et Aujourd'hui, Paris, Bloud et Gay, 1920.

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